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The Art of Disney
24 mars 2010

Tim Burton

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Tim Burton est né le 25 août 1958 à Burbank en Californie. Premier fils de Bill et Jean Burton, le jeune Tim aura par la suite un petit frère, Daniel, qui naîtra trois ans plus tard. A l'âge de douze ans il part s'installer chez sa grand-mère qui vit également à Burbank. L'adolescence du jeune homme est banale et sans histoire, Tim est un garçon calme et introverti, il ne se fera que peu d'amis durant cette période. Malgré le grand nombre de studios installés à Burbank (Warner Bros, Columbia, NBC et bien sur Disney), la ville reste en grande partie résidentielle et populaire. Désintéressé par le monde qui l'entoure, le jeune Tim se réfugie dans les salles de cinéma de la ville où il passera une grande partie de ses jeunes années. Passionné de film d'horreur, Tim Burton était particulièrement fan de l'acteur Vincent Price (dont il rendra hommage avec son court métrage Vincent dans lequel l'acteur prête sa voix). En plus du cinéma, Tim Burton est un passionné de dessin. Ce don lui vaudra de gagner en troisième le premier prix d'un concours local sur le thème de la propreté de la voie publique. Ses esquisses ornèrent ainsi les camions poubelles de Burbank pendant deux mois! Pour gagner un peu d'argent Tim s'occupait également de peindre les vitrines du voisinage pour les fêtes de fin d'année.
A 18 ans (nous sommes en 1976), poussé par un professeur, Burton décroche une b
ourse d'études pour l'Institut des Arts de Californie (Cal Arts). A cette époque le jeune homme ne pensait pas encore faire carrière dans le cinéma, mais cette école était un bon moyen pour lui de développer son sens artistique. Il y réalisa deux films (un film de monstres mexicains et un film de surf). C'est alors qu'il se dit que l'animation serait certainement un bon moyen pour gagner sa vie.

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Joe Ranft et Tim Burton aux Walt Disney Animation Studios

Tim Burton passa trois ans à Cal Arts avant d'être engagé comme animateur par Disney en 1979. Sa première année au sein du studio fut très difficile car sa vision artistique était très éloigné de celle du studio, il se sentait déprimé. On le fit travailler pour Glen Keane qui animait alors les renards de Rox et Rouky. Burton s'entendait très bien avec lui, il était sympathique et l'a beaucoup aidé. Mais il l'a également fait souffrir en le faisant travailler sur les scènes des renards alors que Tim avait énormément de mal à dessiner dans le style Disney. Voici ce que dit l'artiste sur cette période au studio : "Ce qu'il y a de surprenant chez Disney, c'est qu'ils veulent que tu sois à la fois un artiste et un ouvrier zombie sans personnalité. Il faut être quelqu'un d'unique pour pouvoir faire coexister ces deux états dans un même cerveau."
Tim Burton passait pour quelqu'un d'étrange au studio et pour cause, il se comportait comme tel. Par exemple il s'installait fréquemment au fond d'une armoire dont il ne sortait pas, il s'asseyait sur son bureau, ou bien en dessous, un jour il s'arracha même une dent de sagesse et inonda de sang les couloirs (photo ci-dessus). Malgré toutes ces bizarreries Tim Burton abattait suffisamment de travail pour ne pas être viré.
Son style finit tout de même pas intéresser ses supérieurs qui lui confièrent, en même temps que son travail sur
Rox et Rouky, la réalisation de concept arts pour le futur Grand Classique Taram et le Chaudron Magique. Ce poste lui convenait à merveille, tout ce qu'il avait à faire était de s'assoir dans une pièce pendant plusieurs mois et dessiner tous les monstres qui lui passaient par la tête. Mais au bout de quelques mois, lorsque le projet commençait vraiment à décoller, on lui adjoint "ce type", Andreas Deja, animateur de talent au style traditionnel axé sur les personnages. On dit alors à Burton qu'on aimait bien ce qu'il faisait mais que le le style d'Andreas convenait mieux à ce qu'ils recherchaient. Le but de cette rencontre entre les deux artistes étaient certainement d'allier leurs talents (Tim Burton pour les idées et Andreas Deja pour le style). Mais ce fut un grand fiasco, les deux artistes passèrent les mois suivant chacun de leur côté de la pièce sans se parler, chacun faisant ses dessins dans son coin! Au final, aucun des dessins de Tim Burton ne furent utilisés pour le film...

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Vincent (1982)

Néanmoins le style si particulier de Tim Burton intéressait fortement les dirigeants du studio, en particulier Julie Hickson, exécutif, et Tom Wilhite, responsable du développement créatif. Tous deux se rendirent compte que les dessins de Burton recèlaient un talent unique qui méritait d'être soutenu. C'est ainsi que Wilhite offra à Burton, en 1982, 60 000 dollars pour produire Vincent, un court métrage d'animation en stop motion, d'après un poème écrit par Burton dans le style du Dr Seuss, un de ses auteurs de contes pour enfants favoris. Deux mois plus tard, Burton livra avec l'aide de Rick Heinrichs, spécialiste de l'animation en stop motion, un film de cinq minutes en noir et blanc. Vincent, le personnage principal est sans nul doute une caricature de son auteur, dont le talent est déjà bien présent, mais aussi un hommage à Vincent Price, l'acteur favoris de l'artiste. Bien que content du résultat, Disney ne savait pas quoi faire du film dont le style était bien trop éloigné des standards de la maison pour être exploité à grande échelle. Il sera finalement diffusé en salles durant deux petites semaines à Los Angeles, en première partie de Tex, un film pour ados avec Mat Dillon. Il fera ensuite le tour des festivals internationaux de Londres, Chicago, Seattle et Annecy. Le film remporta deux prix au festival de Chicago et le prix de la Critique au festival international du film d'animation d'Annecy.
Après la production de Vincent, Tim Burton réalisa une version asiatique d'Hansel et Gretel , le célèbre conte des frères Grimm, pour  la jeune chaîne Disney Channel. Ecrit par sa productrice exécutive Julie Hickson, ce télfilm au budget de 166 000 dollars n'avait pas la profondeur émotionnelle de Vincent, loin de là. Cependant il reste une parfaite illustration de l'imagination extravagante de l'artiste : un duel de kung fu oppose, lors du final, Hansel et Gretel à la vilaine sorcière, interprétée ici par un homme. Ce film marque également une étape pour Burton. C'est la première fois qu'il travaille avec des comédiens, même si le casting est composé uniquement d'acteurs non professionnels. Malgré la qualité douteuse du téléfilm (il n'a jamais été rediffusé), ce fut une expérience enrichissante pour son auteur.

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Tim Burton a désormais définitivement quitté son statut d'animateur pour celui de réalisateur. Après Hansel et Gretel, l'artiste a de nouveau l'occasion de s'essayer à la réalisation avec le court métrage Frankenweenie, directement inspiré d'un de ses récits. Le film est une stupéfiante relecture du mythique Frankenstein de James Whale (1931) et de sa suite, La Fiancée de Frankenstein (1935). Ecrit par Lenny Lipp, Frankenweenie est produit par Julie Hickson et financé par Disney à hauteur d'un million de dollars. Tim Burton a alors 25 ans. C'est la première fois que le réalisateur travaille avec des comédiens professionnels. Cette pression potentielle ne l'empêche pas d'obtenir d'excellents résultats de la part des acteurs. Prévu pour accompagner la ressortie en salle de Pinocchio, Frankenweenie sera finalement mis au placard par Disney lorsqu'il écope de la classification PG (pour Parental Guidance, soit interdit au moins de 12 ans non accompagnés) en raison de son ambiance trop sombre. Néanmoins, le film connaîtra une brève carrière en Angleterre, en avant-programme de Baby : le secret de la légende oubliée (1984) et sera disponible en VHS en 1992. Frankenweenie signera la dernière collaboration entre Disney et Burton, en effet le réalisateur décide de quitter les studios quelques mois après la fin de la production du film.

En 1985 la chance sourit au réalisateur qui est choisi par Warner Bros (studio qui le suivra durant une grande partie de sa carrière) pour réaliser Pee-Wee Big Adventure film centré sur le personnage de Pee-Wee Herman incarné par l'acteur Paul Reubens. Ce film signe la première collaboration entre Burton et Danny Elfman, compositeur de talent qui signera par la suite presque toutes ses bande originales. Le tournage du film est bouclé en un temps record (un mois seulement) et Burton est dores et déjà dans les petits papiers de la Warner pour réaliser une suite. Mais celui-ci refuse, ne voulant pas être catalogué. Il faudra attendre 1988 et Beetlejuice pour voir revenir le réalisateur dans les salles obscures. Premier film centré sur un personnage crée par ses soins, Beetlejuice sera un beau tremplin pour Burton pour réaliser Batman, en préparation à la Warner depuis déjà dix ans. Le film est un énorme succès mais fut aussi très fatiguant pour Burton qui souhaite revenir à des productions plus intimistes. Ce sera le cas avec son chef-d'oeuvre, Edward aux Mains d'Argent, dont le rôle titre a été confié à un jeune acteur prometteur, Johnny Depp. L'alchimie se fait tout de suite entre les deux hommes qui n'auront de cesse de travailler ensemble par la suite. Après le second opus de Batman, Batman le Défi, Burton signe à nouveau chez Disney pour réaliser son premier long métrage d'animation, L'Étrange Noël de Monsieur Jack. Le film est inspiré d'un poème du réalisateur écrit chez Disney au début des années 80. Ce poème appartenant à Disney, Burton n'a pas d'autre choix que de réaliser le film avec eux. Cependant la réalisation sera confié à Henry Selick, ancien de Cal Arts tout comme Burton et spécialisé dans l'animation en stop motion. Le film sera un succès en demi teinte mais gagnera en estime au fils des ressorties ciné et vidéo. Trois ans plus tard, Burton produit James et la Pêche Géante, second long métrage en stop motion d'Henry Selick pour le compte de Disney. Entre temps le réalisateur signe Ed Wood, seconde collaboration avec Johnny Depp. Au fil des années 90 et 2000, Tim Burton continuera sur sa lancée et signera succès sur succès (Mars Attacks!, Sleepy Hollow, La Planète des Singes, Big Fish, Charlie et la Chocolaterie, Les Noces Funèbres, Sweeney Todd). En 2008, Burton revient une nouvelle fois chez Disney pour réaliser Alice au Pays des Merveilles qui sortira deux ans plus tard. En 2012, Tim Burton réalise Dark Shadows et Frankenweenie, long métrage inspiré du court métrage éponyme de 1984.

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Tim Burton est aujourd'hui un des réalisateurs les plus "côté du marché", son style gothique et torturé ont fait de lui un artiste internationalement connu et reconnu que ce soit par la profession ou le public. Preuve en est sa nomination comme président du jury du 63ème festival de Cannes! Avec encore beaucoup de projets dans ses tiroirs, le petit garçon de Burbank n'a pas fini de nous émerveiller!

 


Taram et le Chaudron Magique :

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Vincent :

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Hansel et Gretel :

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Frankenweenie :

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L'Étrange Noël de Monsieur Jack :

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Alice au Pays des Merveilles :

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14 mars 2010

Francis Glebas

 

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FrancisGlebas_02Son nom ne veut dit peut-être rien, et pourtant, Francis Glebas est à l'origine de certaines des plus belles scènes de films d'animation Disney de ces quinze dernières années. On lui doit notamment la séquence mémorable de la chanson Ce Rêve Bleu dans Aladdin, et la fin magistrale de Pocahontas, une Légende Indienne. C'est avec une grande gentillesse que l'artiste spécialiste du storyboard m'a généreusement envoyé des scans d'une grande partie de ses travaux, dont des dessins de deux séquences inédites de Fantasia 2000. Vous pouvez les consulter à la fin de cet article.

Francis Glebas a été bercé par l'animation dès son plus jeune âge. Tout d'abord avec les nombreux cartoons des Looney Toons qu'il regardait avec émerveillement sur la télé noir et blanc de ses parents, puis en découvrant Blanche Neige et les Sept Nains, film qui le marquera à jamais. A l'âge de 13 ans on lui offre sa première caméra super 8. L'absence de son permit au jeune garçon de développer ses histoires de manière très visuelle. Ses premières réalisations mettaient en scène les enfants du voisinage dans des adaptations de Frankenstein, Star Trek ou bien encore la Momie.  C'est à la même époque que l'artiste réalisa ses premières animations, il reçu d'ailleurs le prix du Kodak Teenage Movie Awards pour l'un de ses films.
Après l'obtention d'une licence en réalisation agrémentée d'une spécialisation en architecture, Francis Glebas décroche une maîtrise de sciences de la communication. Il développe alors une filière de recherche et de formation à l'animation chez Computer Graphics Lab. Son travail consistait à trouver différentes manière d'améliorer les techniques d'animation grâce à des programmes crées par des scientifiques, dont le Dr Ed Catmull (qui créera plus tard Pixar).
Dès lors entièrement dévoué au monde de l'animation, Francis Glebas rentre chez les studios Disney en 1990, où il débute en tant que dessinateur de storyboard sur
Aladdin. L'artiste travaille ensuite sur des séquences du (Le) Roi lion, Pocahontas, une Légende Indienne, Le Bossu de Notre-Dame et Hercule. Par la suite Francis Glebas eut la chance de passer réalisateur sur Fantasia 2000 ou il dirigea la séquence mettant en scène Donald, Pomp and Circumstance. On le retrouve ensuite comme artiste de storyboard sur Dinosaure et La Planète au Trésor. Après la fermeture du département 2-D des studios, Francis Glebas se tourne vers les Disneytoon studios où il réalisera le film Les Aventures de Porcinet puis coréalisera Rox et Rouky 2. On le retrouve par la suite chez Vanguard Animation où il travaillera sur le storyboard de Les Chimpanzés de l'Espace avant de rejoindre le département scénario des studios Blue Sky où il travail encore aujourd'hui.
En plus de son travail d'artiste de storyboard, Francis Glebas a également enseigné et s'est investi dans de nombreuses associations cinématographiques (Academy of Motion Picture Art, Sciences Visual Effect Society, Motion Pictures Srceen Catoonists). En 2008 il publie son premier livre, Directing the Story, où il revient sur son expérience en tant que réalisateur et artiste de storyboard.


Aladdin :

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Pocahontas :

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Hercule :

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Icarus Duck (séquence abandonnée de Fantasia 2000) :

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Ugly Goofling (séquence abandonnée de Fantasia 2000) :

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Les Pins de Rome (Fantasia 2000) :

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Pomp and Circumstance (Fantasia 2000) :

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L'Oiseau de Feu (Fantasia 2000) :

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Dinosaure :

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La Planète au Trésor :

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6 mars 2010

Walt Disney Feature Animation France

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Lorsque l’on parle du cinéma d’animation, on pense immédiatement aux artistes et aux grands studios de production américains. Pourtant l’art des studios Disney se nourrit de la créativité d’artistes issus de tous les pays du globe et de la culture de chacun. De 1989 à 2003, la France a eu le privilège d’accueillir l’un des studios de production de la célèbre maison et a offert la chance à des artistes français de vivre un véritable rêve éveillé. Retour sur cette période remarquable…

Avant de rejoindre Disney, le studio de Montreuil était une petite structure de production cinématographique créée par les célèbres frères Brizzi. Passionnés depuis leur plus jeune âge par la peinture et le dessin, et suite à la rencontre décisive avec Paul Grimault (un des pères fondateurs du cinéma d’animation français et réalisateur du (Le) Roi et l’Oiseau), les frères Brizzi tombent amoureux du cinéma d’animation. C’est pour eux la possibilité de donner vie à la peinture. Créatifs et indépendants, Paul et Gaëtan Brizzi veulent vivre de leur passion et se donner les moyens de leur ambition. Pour se faire, ils créent Brizzi Films en 1986. D’abord situé à Gentilly, le studio déménage très vite à Montreuil-sous-Bois pour intégrer des locaux plus grands et ainsi accueillir plus d’artistes. Brizzi Films vit pendants plusieurs années de la production de publicités, de séries animées pour la télévision (Le Piaf), de la création de personnages, etc. Ceci tout en essayant de développer en parallèle des projets plus originaux de courts et longs métrages animés.

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Paul et Gaëtan Brizzi (directeurs créatif des studios de Montreuil) accompagné de Roy E. Disney

C’est en 1989 que la Walt Disney Company leur offre l’opportunité de travailler sur des projets plus enrichissants en les intégrant au sein de la filiale télévision. Disney arrivait à point nommé au moment où le studio connaissait quelques difficultés financières et où l’envie de travailler sur de nouvelles productions se faisait sentir. L’objectif pour Disney était d’élargir ses possibilités de production et c’est après un tour d’Europe de tous les studios d’animation que Disney a jeté son dévolu sur le petit studio, comme le racontent les frères Brizzi : « Ils ont trouvé au sein de Brizzi Films, la main d’œuvre qualifiée pour subvenir à leur besoin. On a été très honorés parce que pour nous, Gaëtan et moi mais aussi tous les membres de l’équipe, le nom de Disney est venu éclairer le studio. C’était une référence de qualité, de prestige. C’était flatteur pour nous. Disney ne prenait pas d’engagement à la légère. Ils étaient venus, ils avaient envoyé leurs experts pour voir si notre société était sérieusement gérée, si elle était capable de répondre techniquement, artistiquement et créativement aux besoins qu’ils avaient. Et ils nous ont déclaré que dans leur tour d’Europe, on venait largement en tête et que c’était avec nous qu’ils avaient envie de travailler. Ils sentaient que leurs productions seraient entre de bonnes mains. On nous assuré que nous prendrions en charge la production de longs métrages, donc cela nous a fait prendre la décision de vendre Brizzi Films à Disney. Et de diriger la société Disney Animation France en tant que directeurs généraux.» Tous le monde au studio sauta de joie en apprenant cette grande nouvelle, le rêve éveillé commence pour les petits français…   

Chacun s’attèle alors à sa tâche et intègre les méthodes de travail à la Disney : on exacerbe la spécialité et le talent particulier de chaque artiste pour en faire son cœur de métier. On parle d’hyper spécialisation. Une technique de travail à la fois enrichissante car elle permet à chacun d’arriver à un niveau élevé de son art mais aussi contraignante car elle réduit la polyvalence et rend les artistes dépendant les uns des autres.
D’abord intégré dans la filiale télévision, les studios de Montreuil œuvrent sur des séries animées. Ils auront notamment la chance de travailler sur un épisode spécial Noël des Aventures de Winnie l'Ourson, Winnie l'Ourson : Noël à l'Unisson, Super Baloo, La Bande à Dingo, ou encore Bonkers. Le studio produit également deux longs métrage tirés de séries TV : La Bande à Picsou : le Trésor de la Lampe Perdue et Dingo et Max. En 1994, Disney souhaite renforcer ses équipes de production pour les longs métrages, il est alors temps de réaliser la promesse faite aux Brizzi. Le studio passe alors dans la filiale film et est renommé Walt Disney Feature animation France. C'est la consécration pour le studio qui rejoint le cercle très fermé des studios étrangers travaillant sur les Grands Classiques Disney adulés par des millions d’enfants et d’adultes.

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Layout de La Bande à Picsou : Le Film et propositions d'affiches pour Dingo et Max par Jean Duval

A partir de 1994, les studios de Montreuil travaillent sur des projets de plus grande envergure, les Brizzi racontent : « Le travail est devenu beaucoup plus intéressant, plus gratifiant. Chacun pouvait travailler à un rythme plus modéré. Il y avait plus d’argent. Pour les employés c’était beaucoup mieux. Gaëtan et moi restions frustrés car au niveau de la créativité, ce n’était toujours pas mieux. Disney nous a alors proposé de faire un essai sur Le Bossu de Notre Dame en venant à Los Angeles et en étant nommés directeurs de séquence. […] Los Angeles devenait une possibilité de réaliser les paris qu’on s’était fixés ». Les Brizzi restent neuf mois aux Etats-Unis et réussissent à convaincre Disney de leur laisser la production de larges séquences du (Le) Bossu de Notre Dame : « Après avoir fait les storyboards du Bossu, on nous a renvoyé à Paris pour les diriger au sein  de nos équipes. On a fait notre travail de réalisateur et ça a été un an formidable pour réaliser ces passages. […} Ils nous ont confié les séquences les plus importantes, on a repensé complètement le prologue, on leur a proposé de commencer le film de manière très dramatique et spectaculaire avec la poursuite de la mère de Quasimodo par Frollo. […] On nous a vraiment donné carte blanche. Paul et moi avons pu nous exprimer entièrement, pleinement.» Après la production du bossu, les frères Brizzi quittent Montreuil pour s’installer définitivement à Los Angeles et travailler notamment sur la séquence de L'Oiseau de Feu de Fantasia 2000. Les studios continuent ensuite leur travail et participent à de nombreuses productions tels que Hercule, Tarzan, Kuzco, l'Empereur mégalo et Frère des Ours. Cette période sous l’égide de Walt Disney Feature Animation fut particulièrement riche et passionnante. L’émulation est à son comble et tout est mis en œuvre pour stimuler la créativité des artistes. Jean-Luc Ballester, qui a travaillé à l’animation durant 14 ans au sein du studio se rappelle des ateliers dispensés par des animateurs réputés comme Glen Keane lors de la réalisation de Tarzan et des cours sur des sujets précis comme les personnages, le décor, le mouvement, mais aussi des leçons d’acting. Il s’agit de théâtre corporel où l’objectif est d’étudier la gestuelle et les expressions. Ceci est essentiel pour créer un personnage qui plaira et parlera aux spectateurs. A travers les mouvements du corps du personnage, on doit pouvoir ressentir sa personnalité, sa psychologie, ses sentiments et ses émotions. Comme un acteur, l’animateur mime le personnage pour le comprendre et entrer dans sa peau.

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Storyboards pour la série TV Super Baloo et Winnie l'Ourson : Noël à l'Unisson par Jean Duval

La phase de préparation est un moment important dans la réalisation d’un long métrage : les artistes doivent s’imprégner des ambiances, des atmosphères, d’un lieu, d’une odeur, etc. pour réussir à les retranscrire dans leurs dessins. Des visites sont donc organisées comme au musée de Cluny et à Notre Dame de Paris pour Le Bossu de Notre Dame, au zoo de Vincennes et de la Palmyre pour Tarzan. On fait venir des artistes des Etats-Unis tandis que des français partent là bas, pour partager les connaissances, les techniques,  la créativité, les idées... Tout ceci dans la bonne humeur et la joie de travailler pour une maison réputée comme Disney. Certains artistes ont également la chance de travailler sur des séquences de Lilo & Stitch, Le Livre de la Jungle 2, Atlantide, l'Empire Perdu ou encore Fantasia 2000.
Choisis pour leur haut niveau d’exigence, leur créativité et la maîtrise de leur art, les artistes du studio continuent d’améliorer leurs compétences aux côtés des artistes américains et d’intégrer des techniques de production rigoureuses. Le travail avec la maison mère est plutôt contingenté. Les storyboards sont envoyés avec les instructions de production. Les artistes français réalisent les séquences demandées et les envoient ensuite aux Etats-Unis. Pendant que la France dort, les américains travaillent et envoient leurs remarques aux français en retour. Le décalage horaire joue en la faveur des studios.

Malheureusement certains événements vont venir sortir le studio de son rêve éveillé. Le déficit de plusieurs parcs à thèmes, le succès mitigé des derniers longs métrages comme Dinosaure ou Atlantide, l'Empire Perdu ainsi que l’arrivée de Jay Rasulo à la tête de la compagnie, accompagnée d’un changement de stratégie plus tourné vers le business que la créativité vont amener Disney a fermer plusieurs de ses studios dont celui de Montreuil. C’est la douche froide pour tous  les employés! En 2002, on annonce la vente du studio à un repreneur : la société Iétis, créée par Jean-Pierre Quenet, l’ancien directeur du studio de Montreuil, associé à Philippe Grimond (réalisateur d’Astérix et le Coup du Menhir), qui souhaitent créer un studio de 3D. Disney engagerait 50% des frais de production et 50% doivent venir de l’extérieur. Malheureusement Jean-Pierre Quenet et Philippe Grimond ne réussiront pas à trouver les fonds nécessaires et la fermeture du studio est engagée en mai 2003 pour définitivement fermer ses portes en septembre. Les artistes orphelins se répartissent alors au sein de deux nouvelles structures : Néomis créé par Bruno Gaumetou et Welldone créé par Dominique Montferry (aujourd’hui fermé). Tandis que d’autres partent vers de nouveaux horizons en France et à l’étranger.
Passionnés par leur travail, forts du succès de leurs productions, chacun se sentait invincible et s’était senti pousser des ailes. Mais les enjeux économiques ont stoppé net le studio et laissent derrière eux un goût d’inachevé, de gâchis et de déception.

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L'équipe du studio de Montreuil au grand complet (1996)

Malgré cette fin prématurée, les studios de Montreuil auront eu la chance de faire partie de la grande famille de l’animation made in Disney. Cette quinzaine d’années aura permis à des centaines d’artistes de réaliser leur rêve d’enfant d’un jour dessiner des personnages Disney. Mais au-delà de l’accomplissement d’un rêve, c’est aussi un accomplissement professionnel avec la rencontre d’artistes renommés comme Glen Keane, Andreas Deja, Bolhem Bouchiba, Patrick Delage ou même quelques-uns des derniers « nine old men » vivants comme Marc Davis, Frank Thomas ou Eric Larson. Les français ont pu se frotter à des artistes américains plein de talent, acquérir des techniques de travail nouvelles, participer à des projets d’envergure avec des moyens matériels et financiers énormes pour le monde de l’animation. En résumé, Disney a permis de monter le niveau d’un cran et a fait grandir une nouvelle génération d’artistes talentueux.
Aucun ne regrette d’avoir participé à cette aventure captivante et unique en France. Chacun continue aujourd’hui à vivre sa passion, certains aux Etats-Unis chez Pixar, Dreamworks ou bien sur Disney et d’autres en France chez Néomis par exemple.
Pour conclure, ce qui rassemble Paul et Gaëtan Brizzi, Jean Duval et Jean Paul Ballester et sûrement de très nombreux artistes, c’est l’idée que pour faire un  film d’animation réussi, il faut une histoire, un scénario bien écrit, émouvant et qui transporte les téléspectateurs. Walt Disney lui-même défendait cette idée essentielle et aujourd’hui John Lasseter fait de ce principe le cœur du travail des studios Disney et Pixar. La technique ne se suffit pas à elle-même, qu’elle soit 2D ou 3D. Comme l’exprime bien les frères Brizzi, le film ne doit pas être un film « clin d’œil » où l’on passe un bon moment, mais véritablement une expérience inoubliable qui transporte le spectateur. Il doit avoir l’impression que ce qu’il a vu est réel et d’être entré dans un autre univers.

Pour en apprendre encore plus sur les studios de Montreuil, nous vous proposons d’écouter les interviews de Paul et Gaëtan Brizzi, Jean Duval et Jean-Luc Ballester. Bonne écoute!

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